Gargantua : Rire & Savoir
Publié le 10/06/2024
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«
Dissertation : Gargantua
Parcours : rire et savoir
TRANSITIONS :
Le Prologue annonce déjà le registre comique : « Buveurs très illustres » est une manière
amusante de s’adresser aux lecteurs, comme s’ils étaient alcooliques, et que ce trait était
valorisé par la formulation élogieuse « très illustres » ! Mais ce Prologue annonce aussi qu’il
faut prendre en compte le caractère sérieux et didactique de l’œuvre.
En effet, l’auteur
insiste sur le fait qu’il y a un vrai message caché, à ne pas oublier
Le rire Rabelaisien n’est donc pas un simple rire grotesque et démesuré.
Ce n’est que le
masque grimaçant qui cache l’acteur, le contenant qui recèle un savoir précieux…
Voilà le sens de la fameuse métaphore des Silènes, ces petites boîtes dont Rabelais parle
dès le prologue.
Il les compare d’ailleurs à Socrate, le philosophe grec souvent mis en
scène par Platon.
En tout cas, la naissance de Gargantua, c’est la naissance d’un nouveau Héros, qui nous
invite à boire, pour étancher une soif, non pas de vin, mais de savoir.
ACCROCHES :
Le XVIe siècle est énoncé comme une période de transition entre le Moyen Age et la
Renaissance, caractérisée par un renouveau intellectuel.
« Gargantua » de François
Rabelais publié en 1534 s'inscrit comme une œuvre novatrice et audacieuse.
Le récit met en
scène les aventures de Gargantua, un géant aux appétits démesurés.
Gargantua de
Rabelais est un point de rencontre entre le rire et le savoir.
Dès le prologue, Rabelais invite d’ailleurs le lecteur à ne pas se fier au comique apparent de
l’œuvre afin d’en « sucer la substantifique moelle ».
Le lecteur doit « interpréter » le sens
profond derrière la plaisanterie.
Moine et médecins, François Rabelais a correspondu avec les plus grands humanistes de
son temps.
Si il publie ses premiers romans sous un pseudonyme pour les distinguer de ses
publications savantes, son érudition et son adhésion aux idées humanistes y sont cependant
très perceptibles.
La culture antique est inscrite au cœur de l'œuvre, ce qui se perçoit dès le
prologue, s’ouvrant sur une référence au Banquet de Platon, et où le lecteur est invité à
décortiquer le livre pour en extraire “la substantifique moelle”.Mais le “divin savoir” n'est pas
austère chez François Rabelais, il est au contraire source de plaisir et s'accomplit
pleinement dans le rire, “parce que rire est le propre de l'homme”.
ÉLÉMENTS DU PARCOURS
Le rire ludique :
- comique de mots (rire créatif (voire poétique))
Le roman de Rabelais s’apparente à une fête du langage ou le rire triomphe à chaque
phrase.
Gargantua met en lumière l'ingéniosité de Rabelais dans l'utilisation des mots, une
caractéristique qui définit son style comique savant, c’est un comique intellectualisé.
On entre dans un univers lexical propre à Rabelais, qui a su immortaliser ces expressions
dans la langue française (néologisme) comme la "guerre picrocholine", le "repas
pantagruélique", ou encore l'"appétit gargantuesque".
Le choix des noms de ces personnages est fait en toute ingéniosité (onomastique) avec
parfois dans un comique de mot subtil, par exemple l’un des conseillers de Ponocratès
s’appelle: Menuail qui suggère un être menu, frêle; ou bien d'autres comme Merdaille.
Rabelais est sensible à toutes les échelles, il se contente de faire des jeux de mots (épisode
ou Gargantua urine sur Paris : “pas ris” ; “je trouve beau ce” épisode qui raconte les origines
du nom de la région de la Beauce).
Cette ingéniosité est toujours plus accentuée.
Il expose un vocabulaire technique comme la
terminologie médicale omniprésente lors de la description des carnages et démembrements
occasionnés par les coups de Frère Jean.
Rabelais utilise des latinismes et mots savants, par effet de contraste avec un ton burlesque
(Chapitre 19; discours sur les cloches)
L’objectif est de créer le rire et l’enthousiasme en ironisant cependant sur les discours
savants des sophistes, truffés de références et de latinismes qui les rendent inintelligibles…
Alors, le comique sert la dénonciation, plus sérieux qu’il n’y paraît de prime abord.
- comique de la démesure (le gigantisme)
La taille de Gargantua crée un effet comique en raison du décalage entre sa dimension et
celle du monde qui l’entoure.
Comme dans "Micromégas" de Voltaire, le rire est exploité à
travers la perception et la grandeur, en utilisant le comique de disproportion.
Un exemple
notable dans Gargantua est lorsque des boulets de canon sont perçus comme des grains de
raisins.
Cette utilisation de la disproportion est renforcée par des données chiffrées précises,
telles que le nombre de vaches nécessaires à l'allaitement de Gargantua (« dix-sept mille
neuf cent treize vaches ») ou le nombre d'hommes abattus par Frère Jean (« treize mille six
cent vingt-deux »).
Cette hyperbole crée un effet comique, accentuant le contraste entre la
réalité et la fiction, et contribuant ainsi à l'humour dans le récit.
Ce décalage créé par le gigantisme de Gargantua contribue à des passages de comiques
de situations.
comique de situation :
Lors de la naissance de Gargantua, tout est à la fois drôle, excessif et généreux:
Grandgousier a invité tous les habitants de alentours, Gargamelle accouche au bout de 11
mois, et comme elle a mangé trop de tripes, Gargantua doit sortir par l’oreille.
Ce qui
rappelle notamment la naissance de Dionysos (dieu de la vigne, de la fête et des excès).
ton héroï-comique (parodie)
La guerre a tendance à être traitée sur le mode comique, avec la parodie de l’épopée.
L’auteur parodie le code chevaleresque de l’épopée en utilisant la ruse et l’humour.
Ainsi le
héros n’utilise pas l’arme noble mais des éléments cocasses (l’urine du géant ou de la
jument, un arbre, un bâton de croix) ; il n’est pas valeureux et preux mais plutôt fuyard et
pillard (les adversaires sont des anti-héros).
Même dans le camp de Gargantua, le
combattant est mis à mal : le frère Jean combat au nom du service « du vin » (jeu de mot
évident avec le « service divin ») et il n’épargne pas même les repentants.
Il jure comme un
charretier et combattant avec son bâton de croix devient la parodie des chevaliers croisés
(chapitre XXVII ;frère Jean décime l'armée de Picrochole).
Autre exemple, le moment où
Gymnaste stupéfie ses ennemis représente bien cette souplesse de l’esprit qui contourne
les obstacles pour mieux parvenir à ses fins
- comique grotesque
Certains passages relèvent d'un comique scatologique.
L'on peut y rattacher tout ce qui
concerne le bas corporel (chapitre 4, Gargamelle pense accoucher alors qu’elle fait ses
besoins), des parties du corps les moins nobles, mais aussi des pratiques les plus triviales :
uriner, déféquer, accoucher… Rabelais se sert de ses connaissances en médecine pour
approfondir les notions d’anatomie et du fonctionnement du corps humain dans ce roman.
La dimension triviale, grotesque, voire vulgaire, est donc assortie d’une intention didactique,
d’une transmission du savoir.
Le rire réfléchit :
- rire subversif
Il fait la satire de l'éducation dispensée par les sophistes.
Ceux-ci, tout puissant à l'époque,
proposaient une éducation archaïque (Gargantua lit des....
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