Platon, République, X, 601c - 602b: commentaire
Publié le 22/03/2023
Extrait du document
«
Platon, République, X, 601c - 602b:
SOCRATE – Le peintre, disons-nous, peindra une bride et un mors ?
GLAUCON – Oui.
– Mais c’est le cordonnier et le forgeron qui les fabriqueront ?
– Oui, certainement.
– Mais alors, le dessinateur entend-il quelque chose aux exigences requises pour les brides et les mors ? Et même
celui qui les a fabriqués, le forgeron et l’artisan du cuir, s’y entend-il ? N’est-ce pas plutôt celui qui sait les
utiliser, le cavalier, et lui seul ?
– C’est très vrai.
– Ne dirons-nous pas qu’il en va de même pour tout ?
– Comment cela ?
– [601 d] Pour chaque objet, il existe ces trois arts-là : l’art de s’en servir, l’art de le fabriquer, l’art de l’imiter.
– Oui.
– Or l’excellence, la beauté, la justesse de chaque objet fabriqué, de chaque être vivant, de chaque action sontelles ordonnées à autre chose qu’à l’usage de chacun, c’est-à-dire à ce pourquoi chacun existe, qu’il soit fabriqué
ou bien qu’il existe naturellement ?
– C’est bien le cas.
– C’est donc une nécessité déterminante que pour chacun ce soit l’utilisateur qui soit le plus expérimenté, et que
ce soit lui qui communique au fabricant les qualités et les défauts de ce qu’il produit, tels qu’ils se révèlent à
l’usage pour celui qui les utilise.
Par exemple, le flûtiste informe le fabricant de flûtes sur les flûtes qui lui servent
[601 e] à jouer, et c’est lui qui commandera celles qu’il convient de fabriquer, et le fabricant le servira.
– Forcément.
– Ainsi donc, celui qui sait informe sur les aspects utiles ou médiocres des instruments, alors que l’autre les
fabrique en se fiant à lui ?
– Oui.
– De la sorte, en ce qui concerne le même objet fabriqué, le fabricant maintiendra, quant à ses qualités et à ses
défauts, une croyance qui sera correcte, parce qu’il est en communication avec celui qui sait et qu’il est contraint
de l’écouter [602 a], mais c’est celui qui l’utilise qui possède la science.
– Oui, certainement.
– L’imitateur, de son côté, acquerra-t-il par l’usage la science des choses qui constituent le sujet de son dessin,
autrement dit, saura-t-il si elles sont belles et correctes ou non, ou alors en aura-t-il une opinion correcte par la
communication qu’il entretient nécessairement avec celui qui sait et par les directives qu’il en reçoit sur ce qu’il
convient de dessiner ?
– Ni l’un ni l’autre.
– Par conséquent, l’imitateur ne possédera pas de savoir et il n’aura pas d’opinion correcte relativement aux objets
qu’il imite, pour ce qui est de leur beauté ou de leur médiocrité ?
– Apparemment non.
– Charmant personnage que cet expert en imitation dans le domaine de la poésie, quand on pense à sa
connaissance de ce qu’il produit !
– Pas vraiment.
– Et pourtant, [602 b] il ne se privera pas pour autant d’imiter, sans savoir ce qui fait que chaque chose est
médiocre ou utile.
Mais, apparemment, ce qui semble beau au grand nombre et à ceux qui ne savent pas, c’est cela
qu’il imitera.
– Que peut-il faire d’autre ?
– Alors sur ces questions, il me semble en tout cas, notre accord est satisfaisant : en premier lieu, que l’imitateur
ne sait, sur ce qu’il imite, rien qui soit digne qu’on en parle, et que l’imitation n’est qu’une activité puérile,
dépourvue de sérieux ; en second lieu, que ceux qui touchent à la poésie tragique en vers iambiques ou en vers
épiques, sont tous des imitateurs, autant qu’il est possible de l’être.
– Assurément.
Ce passage est issu du livre X de la République de Platon, Socrate et Glaucon à ce moment du livre
tentent de montrer où réside le savoir et pourquoi il faut dénigrer l’imitation (mimésis) et l’imitateur
(mimétès).
Ce passage s’inscrit peu après le début du livre X, où Platon pose comme objet principal du livre
le poète.
En effet, le second dialogue de Socrate du livre X commence par “Du rejet absolu de cette partie de
la poésie qui est imitative” [595a].
Après avoir posé comme constat que certain type de poésie était imitative,
Platon définit par la suite ce qu’est un imitateur dans la séquence [595b - 595e].
Pour ensuite réintroduire la
poésie et le poète qui est l’objet principal du livre X.
Platon va donc montrer que le poète repose sur des
apparences [598b-601a] et prend Homère comme exemple, en montrant que dans tout ce qu’il raconte dans
ces récits tels que la guerre, le commandement des armées, repose que sur l’apparence qu’il en a et non la
connaissance.
Et on arrive enfin à notre passage où Platon termine par dire que “La poésie tragique [...] sont
tous des imitateurs” [602b].
La question affrontée ici est bien celle de savoir, Pourquoi l’imitation n’est pas
belle alors qu’elle en a les apparences ? Platon explique que l’imitateur en tant que peintre ou poète, n’est ni
un utilisateur, ni un artisan mais l’auteur d’un produit sans savoir.
En effet, à partir du dialogue entre Socrate
et Glaucon, Platon arrive à distinguer “trois arts” (l.11) qui lui permet par la suite de les ranger sur une
échelle de la connaissance et de la vérité.
C’est parce que l’utilisateur à l’expérience nécessaire et par
conséquent le savoir et la vérité qu’il est en haut de cette échelle.
Tandis que l’imitateur tel que le peintre ou
le poète ne s’interroge pas sur les caractéristiques de ce qu’il imite qu’il est en bas de l’échelle.
Il n'a en effet
aucune connaissance et il se repose seulement sur les apparences et ce qu’il perçoit sans comprendre.
Et cette
ruse de l’imitateur ou du poète pour être plus dans le sujet du livre X, fonctionne seulement sur le grand
nombre, autrement dit ce qui n’ont pas le savoir, tel que les enfants.
Pour en arriver à cette conclusion,
l'argumentation de Platon se décompose en trois moments.
Tout d’abord Socrate fait une présentation
générale de ce qu’il sait avec l’exemple de la bride et du mort pour faire apparaître les distinctions (l.1-13).
Ensuite, Socrate va s’interroger sur les liens et la place du savoir à partir des “trois arts” qu’il distingue dans
la partie précédente (l.14-30).
Enfin, Socrate démontre que le savoir ne réside pas dans le troisième art, celui
de l’imitation (mimésis), car ce n’est pas le but de l’imitateur (mimétès) (l.31-50).
Le premier mouvement du texte (1-13), Socrate et Glaucon montre à partir d’un exemple, celui de la
bride et du mort qu’il existe trois types d’art produit par trois producteurs distincts, qui n’ont pas tous les
mêmes exigences.
En effet, dans un premier temps nous allons aborder rapidement l’interlocuteur de Socrate qu’est
Glaucon pour ensuite l’écarter pendant le reste de notre explication, puisqu’il n’apporte rien à l’échange dans
cet extrait, en effet, il affirme ou répond toujours dans le sens de Socrate.
Et par conséquent si on enlevait les
passages de Glaucon on pourrait voir apparaître un monologue de Socrate où il s’interroge seul et trouve la
réponse seul.
Par conséquent, dans un second temps, nous pouvons commencer à expliquer le texte plus en détail
avec pour commencer l’exemple pris par Socrate, celui de la bride et du mort au tout début de l’extrait.
Nous
pouvons comprendre cet exemple de plusieurs manières, et en déduire certaine vision que l’on connaît chez
Platon.
Premièrement, à l’époque antique, le mors pour le cheval pouvait être cruel, dangereux comme le
définit Xénophon dans L’art équestre, en effet, il existait deux types de mors le doux et le dure qui était le
plus dangereux, et Xénophon soulignait que le cavalier devait avoir la main douce pour ne pas faire de mal à
sa monture.
Nous pouvons donc voir que seul l’utilisateur à une connaissance assez développée pour
comprendre l’utilisation et le maniement de l’objet en question.
Et c’est ce qui est totalement invisible à la
vision et à l’apparence extérieure que l’on peut avoir lorsque l’on regarde des cavaliers monter durant
l’antiquité.
Cet exemple utilisé par Socrate n’est pas anodin il sert à justifier que le peintre à pour résultat
qu’une imitation qui se base sur des apparences.
Deuxièmement, nous pouvons voir dans cette exemple deux
classes de la citée platonicienne, les gardiens ( ceux qui protègent le peuple) qui sont les cavalier, donc par
conséquent l’utilisateur.
Et l'artisan qui fabrique l’objet en question, qui est défini par Platon comme celui
qui œuvre pour la communauté.
Nous pouvons donc voir que le peintre n'apparaît pas dans l’utilisation de cet
exemple, par conséquent nous pouvons comprendre que Socrate exclut le peintre comme le fait Platon dans
sa citée, et par conséquent il est le contraire de l’artisan, c'est-à-dire celui qui œuvre contre la cité.
Et c’est
une doctrine que nous retrouvons chez Platon avec la condamnation de l’art avec la mimésis et les simulacres
que l’on doit exclure de la cité.
Ensuite, dans un troisième temps, nous pouvons voir que Socrate commence à faire la première
distinction entre l’utilisateur, l’artisan et....
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- Commentaire de texte Platon de la République (livre III)
- MÉTHODOLOGIE DU COMMENTAIRE DE PHILOSOPHIE
- « Ce que je sais, c’est que je ne sais rien » PLATON
- « Apprendre, c’est se ressouvenir de ce que l’on a oublié » PLATON
- « L’opinion est quelque chose d’intermédiaire entre la connaissance et l’ignorance... » PLATON